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La Fédération des barreaux d’Haïti appelle son représentant au CSPJ à surseoir aux séances visant à la désignation de juges à la Cour de Cassation
La fédération des barreaux d’Haïti (FBH) se dit extrêmement préoccupée par le processus de désignation des juges a la Cour de Cassation et en particulier par la position affichée par plusieurs membres du conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ).
Dans une correspondance à son représentant au sein du CSPJ, le bâtonnier de l’ordre des avocats de Fort-Liberté, Me Evens Fils, ‘’le bureau exécutif de la FBH demande à celui-ci de ne prendre part à aucune séance du CSP, ce afin d’éviter de compromettre la Fédération dans l’adoption d’éventuelles décisions prises en violation de la loi.’’
La polémique enfle ces dernières semaines entre avocats et magistrats sur l’opportunité ou non de designer, dans le contexte actuel des juges à la Cour de Cassation par le pouvoir en place dirigé par un premier ministre de facto, n’ayant pas cette prérogative constitutionnelle réservée au président de la République.
D’autres secteurs estiment, cependant qu’en absence du cadre constitutionnel, il faudrait un consensus large avant d’arriver à la nomination de juges à la Cour de Cassation.
Je demande humblement aux très Honorables Membres du CSPJ et au Secrétaire Technique qui se sont montrés à la
hauteur de leur tâche à bien des égards (il nous manque une décision historique sans précèdent pour sauver le CSPJ):
ü De dresser la liste des juridictions et des magistrats n’ayant pas soumis de rapport ;
ü D’accorder un délai de trois mois à ces magistrats afin de soumettre le rapport des trois dernières années dans la
magistrature ;
ü Faire de GICAJ une obligation nationale au niveau de la justice ;
ü De sanctionner les magistrats qui refusent de soumettre leur rapport au terme des trois mois (sauf pour les cas de
force majeure dûment constatés) ; puis, procéder immédiatement à leur remplacement. Les remplacer est le moindre
qu’on puisse faire. Car certains cas requièrent la mise en mouvement de l’action publique contre des magistrats.
Somme toute, si au bout de ces trois mois, les magistrats ayant manqué à leur devoir de reddition de compte ne sont
pas sanctionnés et remplacés, je remettrai ma démission, sous réserves à la FBH d’administrer sa représentation. En
outre, chaque employé du système judiciaire doit soumettre également un rapport de ses activités pour les trois
dernières années. S’il résulte néant ou quasi-néant de l’examen d’un rapport, le magistrat ou l’employé doit être
immédiatement remplacé après l’avoir entendu (sauf cas de force majeure incontestable). De même, aucune décision
ne doit être prise contre un magistrat, si celui-ci n’a pas été entendu préalablement par le Conseil sur les reproches à
lui adressées et non pas par un inspecteur. Si le rapport fait montre d’une réalisation judiciaire présumée suffisante, il
sera procédé à la vérification quantitative et qualitative du rapport, via l’inspection judiciaire.
Au fait, on aura beau se plaindre, critiquer, se montrer de bonne foi. Mais si on accepte un mal chronique, on ne réagit
pas en proportion adéquate, on est coupable du crime. On a une obligation de résultats et non de moyens. Si après
maints discours, le mal prévaut et la funeste réalité prédomine, nous en sommes responsables. Aux grands maux, les
grands remèdes ! Le pays ne manque pas de volonté et d’idées, mais le pays fait face à une carence de décisions
rationnelles, urgentes et d’un leadership responsable.
Nous savons que les chefs de juridiction refusent de soumettre le registre de pointe pour qu’on puisse vérifier la
présence des magistrats dans les Cours et les Tribunaux. Combien de copies de registre en disposons-nous à cette date ?
Nous savons tous qu’il existe de nombreux juges qui résident aux Etats-Unis, Canada, France depuis trois à cinq ans
et qui ne se présentent jamais aux Tribunaux. Pourtant, ils reçoivent chaque mois leur salaire et leurs indemnités
notamment des frais de carburant. Le refus de faire déduit de l’absence répétée de rapport est un motif suffisant pour
décider dans tous les pays du monde. En droit, tout ce qui n’est pas rapporté dans ses formes régulières est censé
n’avoir pas été fait. Bref, nous en savons assez ! Si on se servait des rapports ou des non-rapports, en un seul mois, on
aurait pu éradiquer ce cancer et parvenir à la réforme du siècle !
Par-dessus tout, pour la vérité et pour l’histoire, dans une administration collégiale, il existe deux catégories de
décisions. Les décisionsrelatives aux principesfondamentaux et les décisions de fait. Quant au dernier, c’est le principe
de la majorité qui prévaut. Et la minorité doit accepter la voix de la majorité, me rappelle l’Honorable Conseiller Nader.
C’est ce qui s’est toujours passé entre les dignes Membres du Conseil. Mais quant aux principes fondamentaux
incontournables, la voix de la majorité ne compte pas, a marmonné l’Honorable génie et intrépide Conseiller Durin.
Car il n’y a pas lieu à débattre sur les principes de droit. Ils ne peuvent être objet d’ordre du jour.
En définitive, à l’instar d’un expert-comptable auditeur qui ne trouve, dans une administration, aucun document
comptable, le CSPJ ne peut rien contrôler sans rapport des magistrats, des Cours et des Tribunaux. L’inspection ne
peut rien inspecter sans document de référence (de principes ou de fait). Le déficit de rapport régulier remet en question
l’objet et l’existence même du CSPJ. L’ Honorable Conseiller et écrivain Wando n’en disconviendra guère, estimé-je.
Dans l’espoir que le Conseil relèguera au rapport sa place prépondérante et indispensable dans le processus de contrôle
en prenant les mesures qui s’imposent (pour nous hisser à la dimension d’homme d’Etat par emprunt des termes de
l’Honorable Conseiller Carvès), le Conseiller Evens Fils aimerait bien continuer à servir le pays en collégialité, mais
dans des conditions d’actions acceptables.
J’ai beau parler à cor et à cri de la place dominante et essentielle des rapports au point de croire que, sans apprécier un
ensemble de rapports, on ne peut trancher sur le sort d’aucun magistrat. Tout acte du CSPJ relatif aux Cours et
Tribunaux est d’abord subordonné à l’appréciation des rapports des magistrats. D’abord et toujours. Donc,sans rapport,
le CSPJ ne saurait agir convenablement. Et si c’est seulement à chaque plainte qu’on sollicite un rapport, on devient
un Pouvoir-pompier qui ne peut rien prévoir.
Sans l’ombre d’un doute, le travail déjà réalisé est noble, très Chers Conseillers. Vous, personnellement, avez compris
ce concept et son application. Mais un défi incontournable et un choix fatidique s’imposent : sanctionner équitablement
ceux qui refusent l’autorité des rapports, et par ricochet, ceux qui s’opposent à la mission régalienne du CSPJ :
contrôler, discipliner, administrer la justice.
Salutations respectueuses.
Evens Fils
Bâtonnier de l’Ordre des Avocats de Fort-Liberté
Représentant de la Fédération des Barreaux d’Haïti au
Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ